des héros balkaniques. L’apport des colons fut finalement minime et c’est pourquoi
l’auteur s’est cru autorisé à choisir Horvatský Grób comme type du village de la Plaine
danubienne slovaque. L’identité du terrain, l’identité des travaux, l’identité des cir-
constances ont uniformisé le caractère de la contrée et la qualité d’Horvatský Grób
est d’être, entre tous, un lieu d’élection pour l’ethnographe, un véritable musée.
Etude du parler de Horvatský Grób
par Václav Vážný.
Horvatský Grób, dénommé dans l’idiome local Horvácki Vaizgrub ou Horváti, est
en Slovaquie l’unique colonie croate où subsiste un parler kajkavien. Les émigrés qui
la créèrent, provenaient, en toute vraisemblance, du pays environnant Sisak et Kostanica.
Trois autres villages, situés non loin de Bratislava, à l’ouest des Petites Carpathes, dans
la vallée inférieure de la Morava et à proximité de son confluent avec le Danube — Dë-
vínská Nová Ves (appellation croate: NovoSelo), Dúbravka (Dubráva), Lamač (Lamuoč)*)
— ont, eux aussi, conservé la langue initiale, mais sous la forme d’un parler čakavien.
Encore celui-ci est-il, à Lamač, limité aux derniers représentants de la génération la
plus ancienne; son remplacement par le dialecte slovaque de la contrée, dit „transmon-
tain" ou „de la vallée de la Morava", est un fait presque acquis. Il y a bilinguisme
à Dúbravka et à Děvínská Nová Ves.
Le parler kajkavien se maintient depuis quatre siècles à Horvatský Grób. Sa ré-
gression est pourtant manifeste et la jeunesse en use déjà moins aisément que du slo-
vaque, connu de tous les habitants. Syntaxe et vocabulaire ont été étudiés sur place
par l’auteur, avec le concours de trois écoliers, élèves de l’enseignement secondaire,
fils de paysans croates, qui se prêtèrent de bonne grâce à ses recherches et l’introdui-
sirent dans leurs familles. Les spécimens de langage suivi sont dus au plus âgé, ainsi
qu’à deux femmes, cultivatrices, de souche croate, l’une de soixante-cinq ans, l’autre
de soixante-sept. Les particularités principales du parler kajkavien de Horvatský
Grób peuvent être exposées comme suit.
1. 11 convient tout d’abord de le rattacher, dans l’ensemble, au type ikavien. En
effet, au lieu d’un è originel, protoslave ou plus récent dans les groupes teri, teli,
il y a: d’ordinaire, i, î; quelquefois, e, ê.
2. Pour ь, ъ, le traitement habituel est a. Ces deux lettres sont cependant rempla-
cées par e dans les nom melin, moulin et lef, lion, gén. leva; dans les prépositions ze,
avec, dérivée de s ъ (ze sînom, avec le fils); ze, de, hors de, dérivée de iz ъ (ze sela, du
village); ge, chez, dérivée de k ъ (ge krâlu, chez le roi).
s’est transformé en o dans orol, aigle, gén. orla.
3. A o nasal s’est substitué u; à e nasal, e.
4. Il n’existe aucune différence dans la prononciation de o, qu’il soit court ou
long, accentué ou non. La mutation de o en u s’observe dans kuliko, combien, tuliko,
autant, tant, etc.
5. Au lieu de l sonore il y a généralement u, û. Court ou long, r reste sonore, com-
me dans tout le domaine serbo-croate.
*) Cf la carte p. 411.
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