Podunajská dedina v Československu.


Antonín Václavík, Bratislava 1925

UN VILLAGE DE LA PLAINE DANUBIENNE SLOVAQUE

(Horvatsky Grób)
par

Ant. Václavík.
(Résumé.)

Bien que la Tchécoslovaquie se trouve au coeur même de l’Europe et possède
donc la civilisation moderne, avec ses plus récentes acquisitions, on y peut observer de
nombreuses survivances des moeurs primitives. Quasi disparues à l’ouest, dans les
Pays tchèques, c’est-à-dire en Bohême, en Moravie et en Silésie, elles se sont attardées
à l’est, en Slovaquie et en Russie subcarpathique.

Le territoire slovaque, conquis presque totalement par la Hongrie dans le
premier quart du XIe siècle, ne fut libéré du joug qu’en 1918, à la suite de la guerre
mondiale, et cette seule circonstance suffit à expliquer que l’horloge du temps retarde
pour l’ensemble de sa population. Les Magyars, en effet, tinrent toujours pour serves
et inférieures les diverses nationalités incorporées dans leur Etat; l’aristocratie diri-
geante jugeait utile de maintenir la masse dans l'ignorance: ainsi obéissait-elle et ne
sentait-elle point la bassesse de sa condition. La barrière isolante céda pourtant et le
progrès put pénétrer, au moins sur certains points. Dans la Slovaquie les plaines, ri-
ches, furent surtout accessibles et, malgré les obtacles opposés par les maîtres, par les
organes publics, l’endosmose se fit lentement, automatiquement.

La région comprise entre la chaîne des Petites Carpathes et le Danube dans le
bassin de Bratislava, précédemment appelée „petite plaine hongroise" et à laquelle
peut être maintenant donné le nom de Plaine danubienne slovaque, offre une remar-
quable copénétration du monde ancien et du monde nouveau.

Là, sur le fond des âges préhistoriques,les alluvions des cultures slave, allemande,
puis de la magyare, plus tardive, se sont superposées. L’influence tchèque et, aux
XVe—XVIe siècles, l’influence croate sont intervenues; on ne saurait non plus né-
gliger le voisinage de Vienne, capitale d’une importante monarchie. Le pays, théâtre
de guerres fréquentes, fut parcouru par les armées de presque toutes les puissances
européennes; le croissant turc lui-même y projeta son ombre.

Pareilles conjonctures ne pouvaient manquer de façonner une très précieuse
matière d’observation. L’ethnographe trouve maints sujets d’étude. Il est du plus
haut intérêt de discerner le rôle joué par tel ou tel élément dans la vie des
indigènes. Or la question est surtout liée à la richesse du costume, aux créations ma-
térielles de l’art populaire. C’est pourquoi l’auteur a cru devoir consacrer une mono-
graphie détaillée à l’une des localités les plus curieuses de la Plaine danubienne slo-
vaque: Horvatsky Grób. Les points essentiels en sont notés dans ce sommaire.

*

La commune de Horvatsky Grób est sise au nord-est et à quinze kilomètres de
Bratislava, chef-lieu de la Slovaquie, à la bifurcation des lignes de chemin de fer de
Žilina et de Budapest. La plaine qui l’entoure, se prolonge dans l’île fluviale de la
Grande Schütt (Žitný Ostrov), connue pour sa fertilité. Outre le blé, le seigle, le maïs,
des fruits de toutes sortes y mûrissent, notamment des cerises hâtives, des abricots.
La vigne, abondante, produit un vin fort estimable. Non loin du village s’étendent
des tourbières protégées par la loi tchécoslovaque à titre de curiosité naturelle. Le

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